Lettre postÃÂée ÃÂàThun (Canton de Berne) le 23 aoÃÂût 1843, ÃÂàdestination du Royaume-Uni. En accord avec l'article 5 de la Convention franco-bernoise du 8 dÃÂécembre 1832, l'affranchissement obligatoire pour l'Angleterre est payÃÂé au dÃÂépart jusqu'ÃÂàla frontiÃÂère suisse (Porrentruy) : 6 kreuzer pour 7,5 grammes depuis le troisiÃÂème rayon bernois, marque portÃÂée au verso.
EntrÃÂée en France par le bureau d'ÃÂéchange de Delle, oÃÂù est appliquÃÂée la marque rouge A.E.J.F. Cet affranchissement pour l'ÃÂétranger jusqu'ÃÂàla frontiÃÂère de sortie de France sera remboursÃÂé ÃÂàl'office franÃÂçais par l'office britannique, en accord avec la Convention franco-anglaise du 3 avril 1843 (en vigueur au premier juin).
La lettre transite par Paris le 27 aoÃÂût, d'oÃÂù elle est acheminÃÂée vers Londres, oÃÂù elle arrive le 29. LÃÂà, les postiers anglais calculent les ports ÃÂàpayer par Mrs Ramadge, la destinataire, en se basant sur la Convention prÃÂécitÃÂée : une taxe uniforme de 5 pence est imposÃÂée aux lettres non-affranchies provenant de l'ÃÂétranger (art. 33), ÃÂàlaquelle s'ajoute le prix du transit ÃÂàrembourser ÃÂàla France, prix limitÃÂé ÃÂà5 pence par lettre simple d'une demi once anglaise (art. 36). La mention manuscrite 10 (qui pourrait passer pour un W) est alors portÃÂée au recto de la lettre.
TraversÃÂée de la mer d'Irlande, probablement par Liverpool, et arrivÃÂée ÃÂàDublin le 30 aoÃÂût. Puis acheminement, via Newby le 31 aoÃÂût, vers l'adresse de destination ÃÂàRostrevor (arrivÃÂée le mÃÂême jour, marque au verso).
A Rostrevor, la lettre ne trouve pas sa destinataire, en villÃÂégiature ÃÂàSlane, mais une personne de son entourage accepte la lettre, et paye le port. L'adresse originale est ensuite remplacÃÂée par une nouvelle suscription.
Le postmaster de Rostrevor rature l'indication du port initial 10, et inscrit une nouvelle indication de port, inscrivant deux pence de port dÃÂû pour Slane. Les initiales RS, ÃÂàcÃÂôtÃÂé de la taxe, peuvent dÃÂésigner le parcours supplÃÂémentaire Rostrevor-Slane. Le timbre ÃÂàdate de Rostrevor est apposÃÂé au recto, surmontÃÂé de la mention manuscrite Redirected at, signifiant par lÃÂàque la lettre rentre dans le service postal.
L'ensemble des inscriptions du postmaster de Rostrevor peut ainsi se lire sous forme de rÃÂébus : lettre de l'ÃÂétranger dont les ports dus originaux de 10d ont ÃÂétÃÂé perÃÂçus ÃÂàRostrevor, avant qu'elle soit redirigÃÂée vers Slane en port dÃÂû au tarif intÃÂérieur de 2 pence.
Le courrier est ensuite acheminÃÂé normalement, via Droghera le premier septembre, vers Slane, oÃÂù il est distribuÃÂé le mÃÂême jour.
Les principes ÃÂénoncÃÂés dans les articles 33 et 36 de la Convention sont inscrits in-extenso sur le courrier ci-dessous. Il s'agit d'un pli rÃÂédigÃÂé ÃÂàPernambouc (BrÃÂésil), ÃÂàdestination de l'Espagne, et transmis ÃÂàLiverpool, hors du circuit postal, par l'intermÃÂédiaire d'un achemineur.
A Liverpool, la lettre entre dans le service postal ; l'achemineur paye le double port stipulÃÂé par les deux articles dont il a ÃÂétÃÂé question plus haut, et sur la lettre est notÃÂée la mention Via France 10d, et le calcul explicite 5 + 5/10. On peut noter, d'une part, que le chiffre 10 est calligraphiÃÂé comme un W, de la mÃÂême maniÃÂère que sur la lettre prÃÂécÃÂédente, et, d'autre part, que les britanniques signalent indiffÃÂéremment les ports payÃÂés et les ports dus au recto de la lettre, contrairement ÃÂàl'usage gÃÂénÃÂéral. L'affranchissement est payÃÂé jusqu'ÃÂàla frontiÃÂère d'entrÃÂée en Espagne, comme l'indique la marque ovale PF.
Cachet de dÃÂépart de Liverpool du 18 novembre 1845, transit par Londres le 19, timbre d'entrÃÂée en France ANGL. 2 BOULOGNE 2 du bureau d'ÃÂéchange de Paris (deuxiÃÂème ÃÂéchelon de l'entrÃÂée par Boulogne), arrivÃÂée ÃÂàBarcelone le 27 novembre et taxe manuscrite pour le port intÃÂérieur espagnol, hors convention : 10 reales de vellÃÂón pour un poids entre 6 et 7,5 adarmes, suivant le tarif du 16 novembre 1807 pour les lettres venant d'Angleterre.
La Convention de poste signÃÂée le 14 juin 1833 entre la Grande-Bretagne et la France, si elle rÃÂègle les modalitÃÂés pratiques d'ÃÂéchange du courrier, n'intervient pas au niveau du tarif postal. Les taxes restent celles appliquÃÂées par chacun des deux pays suivant sa rÃÂèglementation propre.CÃÂôtÃÂé anglais, le tarif de la lettre simple (une feuille scellÃÂée de moins d'une once) pour Calais est fixÃÂé ÃÂà1 shilling et 2 pence, notÃÂés en rouge 1/2 sur la lettre. Cette taxe mÃÂécontente les usagers, qui la trouvent trop ÃÂélevÃÂée, la mettent en comparaison avec le tarif intÃÂérieur de 8 pence entre London et Dover (52 Geo III c.88), et qui s'ÃÂétonnent qu'il soit exigÃÂé 6 pence en sus uniquement pour passer le Channel (The Metropolitan, mai 1834).
CÃÂôtÃÂé franÃÂçais, la vieille loi du 4 messidor an 10 (23 juin 1802), faisant suite ÃÂàla convention postale franco-anglaise de la mÃÂême annÃÂée, fixe ÃÂà6 dÃÂécimes, dont 2 dÃÂécimes de port de mer, la taxe devant ÃÂêtre perÃÂçue ÃÂàCalais sur les lettres venant d'Angleterre. Ceci, sans prÃÂéjuger du tarif intÃÂérieur franÃÂçais (article 3).S'y ajoute donc le tarif de la lettre simple appliquÃÂé depuis 1828 (loi du 15 mars 1827), ce qui fait, pour une lettre pesant moins de 7,5 grammes, pour l'intÃÂérieur du pays, 10 dÃÂécimes sur une distance comprise entre 601 et 750 kilomÃÂètres.
Mais ce n'est pas tout. Il faut encore ajouter ÃÂàtout cela la taxe de trois dÃÂécimes pour l'estafette. Ce service a ÃÂétÃÂé crÃÂéÃÂé, entre Calais et Paris, par la loi du 4 juillet 1829, article 2, afin d'accÃÂélÃÂérer la transmission du courrier. Jusque en aoÃÂût 1833, le choix ÃÂétait laissÃÂé ÃÂàl'expÃÂéditeur d'utiliser l'estafette (petite voiture rapide dÃÂédiÃÂée au transport du courrier) plutÃÂôt que la malle (voiture lourde transportant passagers et bagages), ÃÂàcondition de le demander sur sa lettre, et moyennant la surtaxe. Mais ÃÂàpartir d'aoÃÂût 1833 (circulaire 18 du 17/08/1833), tout le courrier passe par l'estafette, sans plus laisser la possibilitÃÂé de choix ÃÂàl'expÃÂéditeur, mais toujours moyennant le paiement de la surtaxe, devenue obligatoire. La mention ANGL.EST., crÃÂéÃÂée pour justifier la surtaxe facultative, est devenue inutile, mais elle continue d'ÃÂêtre appliquÃÂée au moins durant l'annÃÂée 1834.
L'addition de ces diverses taxes donne un total de 19 dÃÂécimes pour la partie franÃÂçaise, soit prÃÂès du double du port requis pour une lettre simple entre Calais et Lyon. AjoutÃÂés aux 14 pence, ou 14 dÃÂécimes, de la partie anglaise, le montant total s'ÃÂélÃÂève ÃÂà3 francs et 30 centimes. Qu'il ÃÂétait donc cher de passer le Channel ...
Ce tarif sera quelque peu rÃÂéduit dans les mois suivants, ÃÂàla suite de la signature d'une nouvelle convention de poste, en 1836, entre la France et la Grande-Bretagne. Il sera rÃÂéduit ÃÂà10 pence pour le parcours de Londres ÃÂàla frontiÃÂère de France, et ÃÂà10 dÃÂécimes pour le parcours de Paris ÃÂàla frontiÃÂère de Grande-Bretagne, le port pour les autres origines ou destinations que les capitales ÃÂétant calculÃÂé en proportion.
La Convention signÃÂée le 12 novembre 1828 entre le Royaume de France et le Canton de Zurich prÃÂévoit que chacun des deux ÃÂÃÂtats, pour leurs ÃÂéchanges de courrier, assumera les frais inhÃÂérents ÃÂàsa propre organisation postale. Le Canton de Zurich se charge de l'acheminement du courrier des Cantons situÃÂé dans la partie orientale du territoire helvÃÂétique.
Le territoire de ces Cantons, associÃÂés ÃÂàla Convention, est ainsi divisÃÂé en trois zones gÃÂéographiques, chacune soumise ÃÂàune taxe spÃÂécifique. La taxe franÃÂçaise est, pour sa part, dÃÂéterminÃÂée selon le tarif de 1828, en fonction de la distance en ligne droite entre le point de dÃÂépart de la lettre et le point d'entrÃÂée ou de sortie du territoire, Huningue.
Pour calculer le port ÃÂàpayer, le 16 dÃÂécembre 1838, au dÃÂépart de Saint-Claude, pour cette lettre de moins de 7,5 grammes ÃÂàdestination de Wingis, le postier a donc, dans un premier temps, appliquÃÂé le barÃÂême franÃÂçais : de 151 ÃÂà220 kilomÃÂètres jusqu'ÃÂàHuningue, un port franÃÂçais de 5 dÃÂécimes ; dans un second temps, il a appliquÃÂé le rÃÂèglement zurichois : le Canton de Thurgovie ÃÂétant dans le second rayon, un port suisse de 12 kreuzer, soit au taux conventionnel, 5 dÃÂécimes. Il a rÃÂésumÃÂé son calcul au verso de la lettre, selon l'usage : France 5, ÃÂÃÂtranger 5, ÃÂégale 10 D, soit 1 franc, ÃÂàpayer par l'expÃÂéditeur.
Au recto, il a tout d'abord appliquÃÂé en rouge sa marque P.P., pour indiquer le port payÃÂé. Puis, considÃÂérant que cette marque, impliquant une notion de limite d'affranchissement, pouvait induire ses collÃÂègues zurichois en erreur, il a rajoutÃÂé par dessus une seconde marque rouge, PD, indiquant cette fois-ci que le port ÃÂétait bien payÃÂé jusqu'ÃÂàsa destination. Le bureau d'ÃÂéchange de Huningue a, au passage, appliquÃÂé une marque rouge L.F., qui prÃÂésente la particularitÃÂé de n'avoir pas ÃÂétÃÂé prÃÂévue pour la Convention franco-zurichoise, mais pour la Convention franco-bÃÂâloise : signifiant Lettre franÃÂçaise, elle ÃÂétait appliquÃÂée sur les courriers frontaliers ÃÂéchangÃÂés gratuitement entre Huningue et BÃÂâle. Elle peut donc ÃÂêtre considÃÂérÃÂée comme une marque de franchise, et avoir ÃÂétÃÂé appliquÃÂée ici avec la signification de Lettre franche.