Paquebots

Correspondances recueillies en mer


      C'est en 1891, lors de la Convention postale tenue à Vienne, et dont les décisions entreront en application au début de juillet 1892, qu'ont été adoptées les mesures concernant l'affranchissement et le timbrage des correspondances recueilles en mer, en dehors des limites territoriales des Etats membres.


Convention article 11-3


Règlement titre VI-3

      Ces dispositions seront reprises dans les mêmes termes, quasiment mot pour mot, dans les conventions suivantes. Ainsi dans l'article 11-5 de la Convention postale de Rome, et dans le titre IX-4 de son règlement d'exécution, qui régissent les échanges postaux internationaux jusqu'après la Grande Guerre.

      La carte postale ci-dessus, à destination de Puisserguier, dans l'Hérault, a été postée le 23 juin 1914, à bord du paquebot Lutétia, de la Compagnie française Sud-Atlantique, lors de son voyage retour de Buenos-Aires. Le navire possédant un agent postal embarqué, c'est règlementairement que celui-ci a apposé l'empreinte du timbre octogonal de la ligne J N°2 sur le timbre-poste français à 10 centimes, empreinte répétée au recto de la carte postale.
A cette date, le tarif intérieur français de la carte postale est identique au tarif de l'Union postale.


Bouchon de Djibouti


      Il faut remonter aux débuts de la poste à Djibouti pour trouver l'origine de la marque bouchon figurant sur la carte postale suivante. Pendant une courte période (janvier/février 1894), les timbres-poste y furent oblitérés par un ovale de points de fabrication locale, avant d'être annulés, à partir de mars 1894, par un timbre dateur à cercle extérieur ondulé*. L'ovale de points n'a cependant pas été détruit, puisqu'on le retrouve, comme le signale Raymond Salles**, dans les années 1923/1931 comme annulation de fortune, en lieu et place de la marque PAQUEBOT.

      Notre carte, adressée au Caylar, dans l'Hérault, a été écrite le 26 mars 1915, à bord d'un navire français, et remise à la boîte ou aux autorités du bord, pour être débarquée à l'escale de Djibouti. Ne comptant que cinq mots de correspondance, elle est affranchie à l'aide d'un timbre français à cinq centimes, conformément aux dispositions que nous avons vues plus haut.

      Le bateau ne possédant pas de bureau de poste embarqué, la carte a été remise au bureau de la poste locale sans aucune marque postale. Le directeur de Djibouti a règlementairement apposé au recto son timbre à date à pont CÔTE FRANÇAISE DES SOMALIS DJIBOUTI.

      A cette époque, il semble donc que le bureau de Djibouti ne dispose pas de la marque spécifique PAQUEBOT, servant à identifier l'origine de la carte, et à en justifier l'affranchissement français. Selon Raymond Salles**, ce type de griffe linéaire n'apparaîtra pas avant 1932. Ceci explique l'annulation de fortune de la Semeuse de notre carte, à l'aide de la vieille marque de points utilisée vingt ans plus tôt. Notons que Raymond Salles ne signale pas cette réutilisation avant 1923. La fourchette de dates se trouve de ce fait singulièrement élargie.

* H. Tristant - Les débuts du service postal à Djibouti, D.P.52 ;  P. Guichenduc - Les débuts de la poste en CFS, D.P.193/201
** R. Salles - La Poste maritime française, T.5

LIVORNO FERROVIA


      Au premier abord, il peut paraître surprenant qu'une carte postale, postée d'un département français vers la capitale, normalement affranchie au tarif intérieur, fasse un détour par un pays voisin, sans supplément de taxe, et revienne en France pour y être distribuée après avoir reçu une oblitération étrangère. Le cas est pourtant prévu par les instances internationales, comme nous l'avons vu, et le traitement à apporter à ce type de courrier est parfaitement réglementé.

      Cette carte porte l'en-tête de Bastia (Corse) le 20 février 1927, et elle est affranchie avec une Semeuse vermillon à 40 centimes, correspondant au tarif de la carte postale ordinaire depuis le 9 août 1926. L'adresse de destination est située dans le XIIème arrondissement de Paris.
Elle aurait pu être mise à la boîte à Bastia même, et aurait alors suivi le chemin ordinaire, par Marseille, en direction de Paris. Au lieu de celà, son expéditeur l'a postée à bord d'un paquebot français en route pour l'Italie, soit qu'il l'ait jetée dans une boîte mobile, soit qu'il l'ait remise à un officier de service. Le navire ne possédant sans doute pas de bureau postal, la carte n'a été traitée qu'après son débarquement, à la première escale de Livourne.

      Deux questions viennent à l'esprit à l'examen de cette pièce atypique : l'affranchissement était-il suffisant pour couvrir le détour italien, et l'administration italienne avait-elle le droit d'annuler le timbre-poste français ?

      L'article 42-3 de la Convention postale de Stockholm (1924) stipule que la correspondance déposée en haute mer, à la boîte mobile d'un paquebot, ou entre les mains d'un agent des postes embarqué ou du capitaine d'un navire, pourra être affranchie à l'aide de timbres-poste et selon le tarif du pays auquel appartient ce navire.

En l'occurence, le navire étant français, la Semeuse à 40 centimes couvrant le tarif intérieur semble parfaitement compatible avec le service postal demandé par l'expéditeur.

      Quant à l'article 36-4 du règlement de détail et d'ordre de la même Convention, il stipule, lui, que l'obligation de timbrer la-dite correspondance (entendez, d'y appliquer sa marque postale) revient, si cela n'a pas été effectué à bord du navire, au bureau de poste auquel est remise cette correspondance. Celui-ci doit alors apposer son timbre à date ordinaire, ainsi que la mention PAQUEBOT, manuscrite ou tampon, indiquant l'origine du courrier.

Dans notre cas, c'est LIVORNO FERROVIA (Livourne-Gare ferroviaire) qui a opéré ce timbrage, la griffe PIROSCAFO FRANCESE (paquebot français) en service dans ce bureau pouvant indiquer que le cas se présentait régulièrement.


NAPOLI PORTO = ESTERO


      De la même manière, en parfaite harmonie avec l'article 42-3 de la Convention postale de Stockholm, cette lettre à destination de la France, postée à bord d'un paquebot français, et déposée au bureau italien de Naples Port-Etranger, est correctement affranchie au tarif intérieur français du 1er avril 1920, bien qu'elle ait transité par l'Italie.

La justification de ce tarif est fournie par l'application sur la lettre du timbre rectangulaire PIROSCAFI ESTERI (paquebots étrangers).


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